Aujourd'hui ma pratique est structurée par deux axes, l'un autour de la prise en compte du passé et du trauma, l'autre autour de la mise en sens de sa vie et de l'expression de soi.
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Quand on vit avec un syndrome de stress post-traumatique, le passé se réinvite constamment dans le présent. Il déborde en nous faisant revoir des images anciennes, en nous faisant ressentir des sensations et des émotions qui ne sont plus là réellement mais qu'on ressent pourtant comme à l'époque des expériences adverses.
Dans ce contexte les recommandations habituelles sont de comprendre ces manifestations (via ce qu'on nomme souvent de la psycho-éducation) et de développer des compétences de régulation émotionnelle et de stabilisation. Apprendre à utiliser la respiration pour calmer les émotions, développer les exercices de visualisation pour se sentir au calme ou pour garder à distance les thématiques déstabilisantes, s'ancrer dans l'ici et maintenant plutôt que d'être dans le passé traumatique sont des éléments très aidants. Ils sont complémentaires à une compréhension de soi fine basée sur le repérage des différentes parties de soi qui ont des façons de penser et de réagir différentes. Pouvoir regarder ses mécanismes de protection sous l'angle de leur utilité et pas seulement de leur gêne peut être une étape importante.
Bien entendu, une autre partie du travail thérapeutique consiste à pouvoir digérer/désensibiliser les souvenirs traumatiques pour les archiver et qu'ils soient "seulement" de mauvais souvenirs et pas des éléments qui reviennent hanter le présent. Pour finir, guérir du trauma c'est aussi mettre en place de nouvelles façons de se regarder, de regarder les autres et le monde.
Ce type de travail thérapeutique se fait sur du moyen ou long terme (c'est à dire plus d'un an de suivi). Il est centré sur le passé et sur des objectifs qui s'entre-croisent. Dans ces accompagnements je me base principalement sur la théorie polyvagale, la théorie de la dissociation structurelle de la personnalité et l'emdr.
Motifs de consultation fréquents (non exhaustif) :
- envahissement par des souvenirs de violences vécues dans l'enfance
- évitement des relations de proximité, d'intimité
- utilisation de stratégies addictives (TCA, addictions à des produits, à des comportements)
- impression chronique de ne pas compter, de ne pas avoir de valeur
- difficulté à identifier les situations de danger et à agir pour s'en protéger
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A côté de cette pratique en psychotrauma visant à ce que les personnes vivent avec moins de souffrances je prête une attention particulière au fait qu'elles puissent ressentir que leurs vies soient stimulantes et qu'elles aient du sens. Cet aspect complète parfois le premier axe que j'ai évoqué mais il est aussi un motif à lui seul de thérapie. On peut aller bien, sans souffrance correspondant à une catégorisation psychiatrique mais ressentir une impression de crise existentielle, de perte de contact avec certaines parties de soi et/ou de ses valeurs.
Pour certain·es, il y a une conscience qu'iels se sont (sur)adapté·es très tôt dans leur vie à ce que le monde extérieur attendait car faire cela c'était être moins en danger, se sentir davantage aimable, etc. Parfois rien d'évident n'est perceptible mais cela n'empêche en rien de travailler ces enjeux avec une focalisation sur le présent et le futur. Qu'est-ce qui m'anime pleinement ? Qu'est-ce qui en moi n'est pas vu et n'a pas de place pour s'exprimer aujourd'hui ? Quels sont les moments où je me sens utile, vraiment connecté·e, participant à une communauté/collectivité ? Ces questions sont un bon début pour produire du changement. Parfois elles peuvent être déstabilisantes, augmenter l'impression de vivre une crise existentielle mais peut-être peut on voir cela autrement que comme un problème mais comme une chance de réorganiser sa vie. Ça peut devenir une occasion pour une exploration de soi/expression de soi, pour plus d'alignement avec ses valeurs, pour plus d'accomplissement dans une perspective qui ne soit pas individualiste.
Ce type de travail thérapeutique se fait sur du court ou moyen terme (c'est à dire moins d'un an, souvent 10 séances). Il est centré sur le futur et un objectif précis. Dans ces accompagnements je me base principalement sur la thérapie brève systémique et sur les outils développés par Philippe Caillé et Yveline Rey.
Motifs de consultation fréquents (non exhaustif) :
- impression que toute sa vie se limite à être "bon·ne élève", efficace au travail et dans sa vie familiale
- crise existentielle suite à la mort d'une personne proche et besoin de trouver plus de sens dans sa vie
- inquiétude sur la situation politique actuelle et interrogation sur comment agir pour plus de justice sociale
- sensation d'étouffement, qu'on a laissé de côté toute une partie de soi qui a besoin d'exister aujourd'hui
- interrogation sur ses études et son futur métier dans un contexte de crise écologique